Famille recomposée : 5 choses que j'ai apprises en 5 ans de famille recomposée
Famille recomposée,  Heureux ensemble,  The Belle-mère diary

Famille recomposée : 5 choses que j’ai apprises en 5 ans de vie commune

The Belle-Mère Diary “C’est comment la vie en famille recomposée ?” “Comment vous avez fait pour que ça marche ?” Des questions de ce genre, on m’en pose souvent ! Il faut dire qu’en 5 ans, nous avons l’impression d’avoir passé beaucoup d’étapes, traversé pas mal d’épreuves et de s’en sortir pas trop mal avec nos enfants. Et une chose est sûre : la famille recomposée, c’est vraiment… pas du tout comme je l’imaginais. Pour moi et pour les autres, voici quelques convictions glanées au fil d’années riches et excitantes (à défaut de paisibles et de toujours faciles) !

1- Notre bonne volonté de suffit pas

Il y a les parents/beaux-parents “Casques bleus”, qui interviennent tout le temps pour faire régner la paix ; les belles-mères atteintes sans avoir en avoir toujours conscience du syndrome de l’infirmière, qui s’emploient à soigner les plaies de leur homme et à passer du baume sur les cicatrices des enfants, comme si elles pouvaient elles-mêmes réparées ce qu’elles n’avaient pas cassé par la force de leur amour et de leur bonne volonté XXL. J’ai été moi-même une mère/belle-mère “Chief Happiness Officer”, occupée à veiller au bien-être de chaque membre de la maisonnée, dévouée à 300% à faire le bonheur de chacun. Car si chacun est heureux, c’est bien le signe qu’on ne l’a pas loupée, notre famille recomposée, non ?

Et comme tous ceux qui se sont lancés dans l’aventure en étant trop zélés, ou avec des objectifs “bigger than life”, je me suis épuisée avant de me réaligner. D’autres sont allées jusqu’à une forme de burn-out et n’ont eu d’autres choix que de s’éloigner pour se retrouver et se reconstruire. Alors autant s’arrêter avant !

Pourquoi ça ne peut pas marcher avec notre seule bonne volonté ?
Ma conviction : parce qu’il y a trop d’histoires et de personnes en jeu dans une famille recomposée, pour espérer embarquer tout le monde dans son projet ou dans sa vision de la famille et du bonheur. A commencer par les enfants, qui en fonction de leur âge et de leur personnalité vivront différemment la famille recomposée. Mais aussi et surtout les ex qui, même s’ils ne vivent pas avec nous, sont omniprésents, en permanence ou presque. Même si cela nous exaspère, leur ombre plane toujours : que ce soit à travers les projets suspendus à leurs décisions, leur façon – ou non –  de légitimer le beau-parent et dont dépend en grande partie l’attachement – ou pas – de l’enfant à l’amoureux ou l’amoureuse de leur parent. 

Une sacrée couleuvre à avaler : la réussite de notre projet familial dépend de bien d’autres que nous. Pire : c’est bien souvent des ex qu’elle dépend.

2- Le temps est l’allié des familles recomposées

Quand je regarde dans le rétro, je me dis qu’on revient de loin. En famille recomposée, les débuts de la vie commune, souvent, sont compliqués. Surtout quand la rupture de l’ancien couple est récente, encore plus quand le couple a rompu du fait de la nouvelle belle-mère ou du nouveau beau-père. Les enfants arrivent souvent chamboulés, perdus, tiraillés entre leurs deux parents et pas toujours enclins à accueillir un nouvel adulte  – et d’autres enfants ! – dans leur vie.

Les premiers mois voire années sont souvent tendus, jalonnés de compromis plus ou moins faciles, de concessions plus ou moins lourdes pour tous. Partager le quotidien est rarement une chose évidente et fluide, cela relève davantage d’un apprentissage, d’un apprivoisement réciproque. 

Ma conviction : pour que la mayonnaise prenne, il faut passer du temps ensemble, et surtout du bon temps. Que des souvenirs et des rituels se créent, qu’ils soient le terreau d’une complicité qui se cultive, d’une connivence qui se travaille et bientôt d’un attachement réciproque (ou a minima d’un respect prudent qui suffit à permettre la vie ensemble). Parfois, cerise le gateau, l’amour s’invite naturellement. Mais penser qu’il doit naître naturellement est faire peser sur nos épaules une charge immense !

A la maison, aujourd’hui, les enfants rient ensemble des agacements qui les faisaient bondir au début, des différences qui les ont surpris d’abord, heurtés parfois. Ils parlent même des peurs qui envenimaient les relations dans les premiers jours… Les mots rassurants qu’on leur a répétés à l’époque ne semblaient pas les apaiser. Le temps et le quotidien partagé l’ont semble-t-il fait beaucoup mieux.

3 – Mais rien n’est jamais acquis, les retours en arrière sont nombreux

Si les débuts sont durs, les conflits ouverts, les tensions au comble, on a tendance à baisser la garde au bout d’un certain temps, quand “tout roule”. Mais en famille recomposée, sans lien de sang, rien n’est jamais vraiment acquis. La jalousie entre les enfants, le rejet du beau-parent, le conflit de loyauté… tout ce qui nous a pourri la vie ensemble au début, tout ce qui a failli bien souvent nous faire perdre espoir, est revenu ponctuellement. Plus ou moins fort, pas toujours sous la même forme, mais c’est revenu.

Ce que j’ai appris ? Les difficultés peuvent ressurgir sans prévenir, alors même que rien n’a changé sous notre toit, dans notre éducation… Mais alors, pourquoi les braises parfois se réveillent ?

  • Parce qu’il suffit qu’un ex rencontre quelqu’un ou se sépare pour venir tout bousculer façon domino (“Si papa est à nouveau célibataire depuis qu’il a quitté Leila, il peut se remettre avec maman qui est triste depuis le divorce ? »).
  • Parce qu’un petit frère ou une petite soeur de l’autre côté peut tout déséquilibrer (« Papa m’a remplacé par mon petit frère, je suis sûre que maman aussi peut me remplacer demain avec un bébé, en fait, aucun ne m’aime”)
  • Parce qu’un mal-être adolescent passager peut faire vriller des liens tissés avec patience pendant des années (“Mon beau-père a toujours été trop rigide, de toute façon, c’est à cause de lui que je ne peux jamais sortir avec mes copines”)…

Des retours en arrière épuisants, démotivants, désespérants quand on les vit. Mais pour lesquels, sans forcément s’en rendre compte, nous sommes de mieux en mieux armés.

Ma conviction : la famille recomposée offre une multitude d’alibis faciles quand tout d’un coup quelque chose ne va pas dans la vie d’un de ses membres. C’est le réceptacle tout trouvé des mécontentements divers et variés. Le coupable idéal !  La leçon à en tirer : mieux vaut se dire que rien n’est jamais acquis. J’ai par exemple trop vite conclu, quand les temps passés ensemble sont devenus plus sereins et les relations apaisées, que les enfants vivaient bien le mode tribu. Ce qui n’était pas faux, mais j’ai découvert au bout de 5 ans qu’ils avaient toujours autant besoin de temps avec leur parent biologique, de ce mode “cocon rapproché sans “les autres”” plusieurs fois dans l’année, pour regonfler leur batterie et mieux vivre ensuite le quotidien recomposé. De la même manière, s’ils le manifestent moins parce qu’ils ont grandi, parce qu’ils ont peur de heurter leur beau-parent ou de faire la peine à leur parent, ils ont souvent le même besoin d’être écoutés et rassurés sur leur place et l’amour qu’on leur porte. Famille recomposée ou pas, vous me direz certainement…

4- Communiquer est fondamental, mais pas n’importe quand, n’importe comment

Tous les experts vous le diront : la communication est la clé de tout couple, et à plus forte raison en famille recomposée, tant elle offre de sujets de tensions. Sauf que parler régulièrement de ce qui coince c’est bien, mais le mode “cahier de doléance” tous les quatre matins, ça userait tout le monde. Il faut savoir aussi se réjouir de ce qui marche, du chemin parcouru… et s’armer de patience, de douceur et d’une grande dose de bienveillance quand il s’agit de parler à notre partenaire de ses enfants.

Ma conviction : C’est LE sujet sensible par dessus tous. Celui qui rend toute conversation potentiellement explosive. Comment exprimer un ressenti douloureux ou demander une intervention de sa part, sans critiquer ouvertement la chair de sa chair ? Car toute remarque peut très vite être prise pour une attaque, une remise en question de l’éducation qu’il ou elle a donné, une volonté de rabaisser l’enfant bien aimé. Mon conseil : éviter les récriminations excessives et répétitives – choisissez vos combats plutôt qu’exiger des changements sur de nombreux points – parlez de vous et de vos besoins avant tout, avant “d’attaquer” sur ce qui vous agace chez ses enfants. Et surtout, n’oubliez pas qu’il faut bien 5 remarques positives pour “contrebalancer” une critique… Mon conseil : reconnaître les qualités des enfants de l’autre, se réjouir ensemble de leurs progrès et de leur évolution au quotidien permet plus légitimement (à défaut de plus facilement) de dire aussi ce qui ne va pas ou devrait selon vous changer. Et vous évitera de paraître systématique “à charge” (ou de vous l’entendre rétorquer à la moindre demande que vous formulerez). 

5- Il n’y a pas qu’une façon d’être une famille recomposée : les injonctions font perdre du temps et de l’énergie

“Aimer ses enfants comme les siens”, “traiter tout le monde pareil”, “habiter tous sous le même toit”, “avoir le même rythme de garde”, “faire un bébé pour être vraiment une famille”… Je peux le parier : tout le monde aura sa petite idée sur ce que devrait être votre famille recomposée et vous la donnera. Et je parie aussi qu’il y a des chances qu’aucune ne corresponde vraiment à votre famille à vous.

J’ai découvert que c’est en me faisant confiance que j’ai pu trouver ma place et la “bonne distance” avec ses enfants, avec ses parents, avec son ex. Je reste le parent référent de mes enfants, je ne prends pas de rôle maternel auprès de mes beaux-enfants, je suis toujours là si besoin pour soigner, consoler, déposer chez un copain, garder au chaud ou accompagner chez le médecin quand ils sont malades. Mais je suis très attachée à l’idée d’être une adulte bonus, avec qui il y a une liberté qu’ils ne s’autoriseraient peut-être pas avec leurs parents. Pour certaines belles-mères, je dois apparaître “utilisée” ou “pas assez respectée”, « pas assez impliquée ». D’autres m’accuseront certainement de traiter mes beaux-enfants différemment de mes propres enfants. J’imagine que tout est vrai… mais pour moi, ça fonctionne bien ainsi.

J’ai connu avec Les Nichées, des familles recomposées épanouies qui s’étaient construites sur des bases tellement différentes ! Des pères séparés de leurs enfants qui réussissaient à s’occuper à temps plein des enfants de leur conjointe (quel courage quand on est privé des siens !), des mères qui s’occupaient de toute une fournée de petits sans faire aucune différence, des familles qui s’étaient recomposées mais vivaient dans des maisons, voire des pays, différents. J’ai écouté des beaux-pères très investis me raconter comment le lien avec leurs beaux-enfants avait évolué après leur séparation d’avec la maman. D’autres me dire qu’ils avaient noué avec leur beaux-enfants adultes des liens qu’ils avaient été incapables de cultiver quand ils étaient petits sous leur toit… 

Ma conviction ? Vous êtes les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour votre couple et votre tribu. En famille recomposée, plus encore qu’en famille “traditionnelle”, le “one size fits all” ne fonctionne pas. Il n’y a pas de modèle unique, pas de recette miracle et surtout votre quotidien et les difficultés que vous rencontrez aujourd’hui ne conditionnent ou ne prédisent en rien ce que sera votre famille ou vos liens demain. Bonne route à tous ! (même si elle est longue et tortueuse, vous n’avez jamais été si prêts de l’arrivée).

Rédactrice depuis presque 20 ans, Coralie s'est spécialisée dans les sujets lifestyle et tout ce qui touche la famille (société, psychologie, éducation, développement de l'enfant, bien-être...). Mère et belle-mère, elle chronique régulièrement sur Les Nichées ses coups de coeur et sa vie en famille recomposée.