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Parent séparé

Parents séparés : surmonter le grand blues de Noël

Comment fêter Noël sans ses enfants ? Pourquoi réveillonner sans eux ? Que faire s’ils ne sont pas là pour ouvrir leurs cadeaux ? Les parents séparés le savent : un réveillon ou un déjeuner de Noël où l’on ne pense qu’aux absents, c’est très difficile à vivre. Parce qu’il y a la charge symbolique de cette fête familiale par excellence et parce qu’ils peuvent expérimenter une solitude écrasante. Pourtant, il est possible de vivre les fêtes autrement. Les conseils de la psychoclinicienne Yvonne Poncet, pour éviter de ruminer et déprimer. Objectif : des fêtes plus légères… pour tous !

1- Noël et les séparations mal cicatrisées

“Les personnes qui souffrent le plus de passer Noël en tant que parent séparé sont souvent ceux qui restent attachés à Noël pour l’ambiance et le cocooning familial : les illuminations, les grandes tablées… », décrypte Yvonne Poncet, auteure entre autres de Vivre heureux dans une famille recomposée. « Bref, l’image d’une famille heureuse.” Une image d’Epinal, pour certains, une image du “paradis perdu” de l’avant, pour d’autres, celui du temps où le couple était encore ensemble à regarder les yeux de leurs enfants briller devant le sapin. 

Résultat : des crispations qui se réveillent, de la colère parfois, de la tristesse souvent, aussi. Difficile d’être détaché quand on a l’impression que l’autre nous a arraché.e la moitié de notre cœur et qui plus est, nous prive de nos enfants à Noël une année sur deux. La psychoclinicienne confirme : “Ces moments-là montrent si l’on est totalement détachés ou pas, où l’on en est vraiment de la séparation. On peut avoir dévitalisé le lien amoureux mais en revanche, on peut ne pas avoir réussi à dévitaliser le lien familial.” Concrètement, on n’a simplement pas fait le deuil de notre famille et les fêtes de fin d’année nous font l’effet de poignées de sel sur des plaies béantes. 

C’est peut-être le moment de vous rappeler que vos « Noëls d’avant » n’ont pas toujours été tout roses, que vous avez connu des tensions en famille, des ambiances lourdes autour de la table, des agacements et des disputes… Bref, prenez conscience de la charge symbolique de Noël pour faire la part des choses : qu’est-ce qui vous fait vous sentir mal ? On vous donne quelques pistes pour creuser un peu plus loin.

2- Se réapproprier sa vie… sans ses enfants

Cette année, ils sont chez l’autre parent pour Noël et vous appréhendez de le passer seul.e ? Et si vous commenciez par vous dire que vous n’allez pas le passer “seul.e”, justement, mais sans vos enfants. Cela ouvre quelques perspectives supplémentaires. “C’est exactement comme le syndrôme du nid vide, précise la psy. Tout est à inventer. Il faut réapprendre à vivre sa vie, pour soi. C’est aussi le moment de réaffirmer que la vie des enfants n’est pas la vôtre. Qu’ils ne sont pas une prolongation de vous, mais bien un être à part. A vous alors de faire en sorte de ne pas trop projeter et attendre d’eux. Veillez autant que possible à avoir un noyau d’amis, un réseau, une manière d’être heureux bien à vous.” Ce qui vaut à Noël mais aussi 365 jours par an.

Vivre Heureux dans une famille recomposée est un guide très utile où les auteures, psy et coach, partagent leur vision et leurs conseils pour chaque membre de la tribu. Pour mieux comprendre ce que chacun traverse, là où peuvent se nicher ses difficultés et pour trouver le moyen ensemble de construire une nouvelle vie de famille.

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3- Désacraliser Noël pour mieux le vivre sans enfants

“Noël sans mes enfants, à quoi bon ? Je ne le fêterai pas !” Alors quelle solution ? Fêter Noël en tête à tête avec vous-même ? Ruminer devant un plateau-télé ?

Traverser Noël sans ses enfants, c’est vrai, entraîne une perte de repères : on avait pris l’habitude de revivre à travers leur émerveillement nos propres ressentis d’enfant. Quand ils ne sont plus là, Noël perd beaucoup de son sens et en tant qu’adultes, on ne retrouve plus ces attentes d’enfant : l’excitation, la fête. l’attente des cadeaux… L’excitation retombe, on n’a plus très envie de décorer le sapin, ni de se ruer sur la dinde ou la bûche aux marrons. La solution pour éviter la déprime totale ?  “Désacraliser Noël ! recommande Yvonne Poncet. Mon conseil : nourrissez-vous de l’ambiance festive. Ce qui est important, au final, c’est tout ce qui se passe avant Noël : les illuminations dehors, se sentir bien chez soi, au chaud, en famille…” Et bonne nouvelle : tout cela peut se faire avant le 24 décembre. Profitez de la décoration du sapin, organisez des virées au marché de Noël, cuisinez des goûters de Noël à la maison avec vos enfants… Pas besoin d’attendre le jour J pour savourer avec eux l’esprit de Noël.

4- S’organiser en amont pour ne pas être seul.e à Noël 

Vous craignez d’être seul.e à Noël, sans vos enfants ?  “Il est capital de vous organiser en amont. Surtout pour le soir du réveillon qui a tendance à cristalliser toutes les attentes. Cela veut dire concrètement : prendre de l’avance pour ne pas se retrouver seul.e à Noël alors que tout le monde est en train de faire la fête. Il n’y a rien de pire pour accentuer le côté nostalgique et dépressogène du moment. Quelques idées : inviter les amis qui sont seuls, penser notamment à ceux qui n’ont pas leurs enfants, comme vous ; ou se faire inviter, aussi. Cela implique de demander et donc d’oser dire sa solitude. C’est dur, bien sûr, mais il faut le faire si vous en avez besoin. Quoi qu’il arrive, il s’agit de trouver comment ne pas souffrir. Vous ne vous sentez pas de réveillonner avec des amis ? Pourquoi ne pas vous porter volontaire pour travailler aux Restos du Coeur ou dans une autre association ? Noël trouvera alors un autre sens et prendra la forme d’un don.”

5- Oser passer Noël tout.e seul.e ?

Si l’idée ne vous effraie pas, rien ne vous oblige à “fêter Noël coûte que coûte”. “Inutile de se forcer à fêter Noël, bien sûr, si vous n’en avez pas envie !”, confirme la psy. “Certains passent un bon réveillon devant la télévision ou avec un bon bouquin et un petit plat et puis basta !” L’important : que ce soit un rituel agréable et non une punition que l’on va jeter à la figure de ses enfants en mode “Je suis resté.e tout.e seul.e chez moi, devant la TV, pendant que vous vous amusiez”. “Culpabilisation et victimisation sont à éviter absolument vis-à-vis des enfants sous peine de renforcer leur sentiment de culpabilité, met en garde Yvonne Poncet. Noël quand on a des parents séparés, c’est toujours un déchirement car on en laisse toujours un tout seul. C’est un moment où plus que jamais, les enfants se sentent coupés en deux.” Et franchement, on préférerait leur épargner ça, non ?

6- Alléger aussi les enfants

“Quand on privilégie avant tout le bonheur de ses enfants, on leur évite toute position où ils seraient pris dans ces conflits de loyauté”, résume la psy. Même si notre coeur est lourd, mieux vaut le rassurer, en lui disant “je suis invité.e chez Untel” ou “On a prévu d’aller là avec Unetelle” et de l’encourager à profiter au maximum de son côté des fêtes. “L’idéal est d’avoir un discours de renforcement positif, conclut-elle. « Passe un bon Noël, ne t’inquiète pas, je vais passer un bon moment de mon côté “ suffit à autoriser l’enfant à profiter (sans trop d’arrière-pensée). Parce que vous lui manquez aussi, parce qu’il se doute qu’il vous manque, mais qu’il sera soulagé s’il vous le rassurez. Au fond, c’est simple : un parent heureux rend les enfants heureux.”

Journaliste depuis plus de 20 ans, ancienne rédactrice en chef de Psychologies.com, je m'intéresse depuis toujours aux questions familiales et la psycho au sens large. Je suis moi-même mère et belle-mère et partage ici les meilleurs conseils d'experts pour vivre le plus sereinement possible le quotidien de parent séparé, que vous viviez en famille monoparentale ou recomposée.