Eviter les disputes entre enfants en famille recomposée
Heureux ensemble

Eviter les disputes en famille recomposée : nos conseils au cas par cas

Pour un jouet, un biscuit, un mot malheureux, vos enfants ne cessent de se chamailler ? Ces disputes qui émaillent votre quotidien de famille recomposée vous pèsent ? Elles jouent même parfois sur votre couple ? La coach parental Elena Goutard, auteure de Mon P’tit Cahier Nouvelle Tribu, vous donne ses astuces pour désamorcer les situations conflictuelles et éviter au maximum les disputes.

Avec la famille recomposée, mon enfant a changé de rang dans la fratrie et ça complique tout

C’est un vrai bouleversement pour les enfants : l’arrivée de “quasi” ou “demi” frères et soeurs vient bousculer leur rang dans la fratrie. Que celui qui était enfant unique et qui ne l’est plus, celui qui était l’aîné mais qui est désormais plus petit qu’un autre. Sans parler du petit dernier qui d’un coup ne l’est plus… C’est un véritable Big Bang pour eux et cela peut attiser les rivalités pour trouver ou retrouver sa place, comme l’a vécu Céline, au début de sa famille recomposée. “Dès la rencontre, alors même que nous n’habitions pas ensemble, la relation entre sa fille aînée et mon fils aîné a été explosive. Ils avaient deux ans d’écart, n’avaient pas grand-chose en commun et pourtant ils ne cessaient de se chercher, de se comparer, de se défier… On a mis un peu de temps à comprendre qu’ils se sentaient tous les deux menacés dans leur rôle du “plus grand” et qu’ils se mettaient en permanence dans un rapport de rivalité.”

Le conseil d’Elena Goutard pour apaiser les tensions ? “Dans ce cas, il faut veiller à ce qu’ils ne perdent pas au change” avec la recomposition. Par exemple, s’ils avaient des responsabilités ou des petits droits ou libertés en plus, du fait de leur âge, il faut faire attention à ce qu’ils conservent ces petits plus. Le but est d’éviter absolument qu’ils se sentent privés de quelque chose d’important pour eux et qu’ils aient l’impression d’être lésés par la nouvelle configuration familiale.”

Par exemple, si l’un d’entre eux avait le droit, avant, de se coucher un peu plus tard que sa soeur car il était plus âgé, il faut toujours lui permettre de se coucher un peu plus tard, même si ce n’est plus lui le plus grand désormais. “Les plus jeunes aussi peuvent être perturbés par l’arrivée dans la famille de plus petits qu’eux. Pour les enfants uniques, aussi, c’est un bouleversement. Mais s’ils sont accompagnés et rassurés par les parents, la recomposition est au final toujours positive pour les enfants uniques qui bénéficient de la présence d’autres enfants, qu’ils soient plus jeunes ou plus âgés qu’eux.”

A lire pour faire le plein de conseils pratiques quand on se lance dans l’aventure de la recomposition :

Mon P’tit Cahier Nouvelle Tribu, d’Elena Goutard, Solar Editions

Les enfants sont jaloux les uns des autres

Comme dans n’importe quelle fratrie, la jalousie est normale. Et comme dans n’importe quelle fratrie, il est possible de limiter la casse : on évite autant que possible les étiquettes (“tu es toujours méchant”), les comparaisons (“Les Dupont sont plus débrouillards que vous !”). Et on tente d’éviter le favoritisme, ce qui est loin d’être évident, comme l’explique Elena Goutard : “Attention, le favoritisme peut marcher dans les deux sens. Oui, le parent biologique peut être tenté de favoriser ses enfants ! C’est humain : ils sont notre chair et on culpabilise souvent de ce que l’on leur fait subir, de notre histoire passée. Et puis, si cela se passe mal chez l’autre parent de notre enfant, on va vouloir compenser, on risque alors de surinvestir la relation et même parfois avoir du mal à faire respecter certaines règles. On va être plus coulant et ça, les enfants le sentent bien. Mais le piège inverse existe : on peut favoriser les enfants de l’autre parce que l’on a envie de créer coûte que coûte une belle relation avec eux. On peut alors avoir tendance à les laisser faire ou à ne pas les reprendre s’ils ne respectent pas les règles communes pour avoir une bonne image à leurs yeux… Il est plus facile, parfois, d’être plus strict avec nos enfants ! Il peut arriver aussi que, sans nous en rendre compte, nous favorisions les plus petits au détriment des plus grands, ou les filles par rapport aux garçons (ou inversement)…   L’important est d’en prendre conscience pour comprendre éventuellement ce qui attise la jalousie chez les enfants et pouvoir ajuster notre comportement en conséquence.”

Les enfants n’aiment pas jouer ensemble

Même si cela ne colle pas avec l’image d’Epinal de la famille recomposée, on ne peut pas obliger des enfants à s’entendre ! “On ne va pas non plus les obliger à jouer ensemble ou à passer du temps ensemble s’ils n’en ont pas envie, prévient Elena Goutard. Pourquoi ? Parce qu’il vaut mieux respecter leur rythme et leurs besoins. Un grand classique dans toutes les familles : le petit est toujours en demande de jouer avec le grand qui, lui, n’en a pas toujours envie. Je conseille de ne pas obliger le grand à jouer avec le petit mais plutôt d’accompagner l’émotion du plus jeune. Expliquez-lui que le grand est plus grand et ne joue plus comme lui le fait à son âge.” On accompagne ainsi celui qui se sent le plus lésé et en même temps, on laisse la liberté à l’autre de créer la relation de son plein gré et à son propre rythme.

“Parce que plus on les pousse, plus on risque de créer ce que l’on appelle en psychologie “l’instinct de contre-volonté”, c’est-à-dire de la résistance, prévient la coach. “C’est valable à tous les âges de la vie : chez les plus petits, comme chez les ados ou même les adultes. En famille recomposée, plus on me met la pression, plus on me force à aimer les enfants de l’autre, moins j’ai envie de le faire. Mieux vaut donc faire confiance au temps !”

Nos enfants ne se comprennent pas

Malentendus à gogo, maladresses qui créent de véritables drames, difficultés à se parler sans s’agresser… Contrairement aux frères et sœurs qui se connaissent depuis la naissance, les “quasi frères et soeurs” sont – tout du moins au début de la famille recomposée – surtout des quasi inconnus. Ils ne savent pas comment se parler, ils ne devinent pas ce qui va vexer les uns ou les autres, ils ne se comprennent bien souvent que très mal.

La solution ? Passer du temps ensemble, si possible du bon temps. “Se créer des moments d’échange tous ensemble, c’est essentiel pour nourrir la relation entre les enfants, recommande Elena Goutard. Une activité le week-end, une soirée dessins animés par ci, un repas “apéritif” par là… ces moments joyeux peuvent devenir de nouveaux et joyeux rituels qui vont permettre aux enfants de se connaître, de s’attacher naturellement les uns aux autres et ainsi d’être plus à l’écoute des besoins des autres.” Leurs relations n’en seront alors que plus fluides.

Mon enfant se met en retrait/n’est pas aimable avec les autres

Votre enfant est irritable ? Il se met en retrait et ne veut pas jouer avec les autres ? Il n’est pas rare que la famille recomposée devienne étouffante (pour les adultes comme pour les enfants). La recommandation de la coach ? “Veillez à ce que chaque enfant ait un endroit où s’isoler quand ça ne va plus trop, quand le collectif est “trop” pour lui. S’il a sa propre chambre, c’est parfait. Sinon, vous pouvez lui demander ce qu’il aimerait pour se créer une petite bulle: une petite tente, un tipi, un lit à baldaquin…”

Parfois, l’enfant peut se montrer réticent à bien s’entendre avec les autres (ou à le montrer) parce qu’il est au coeur du conflit de loyauté : il peut ainsi s’empêcher de passer du bon temps avec les autres, inconsciemment bien sûr, par peur de trahir l’autre parent : “si je m’amuse bien avec les enfants de Sylvie, est-ce que maman va m’en vouloir ? Si je les aime bien, elle va peut-être être triste…”. Cela peut le pousser à se mettre en retrait ou à éviter de créer du lien avec les autres enfants. Le conseil de la coach : “Ne pas le forcer à jouer avec les autres membres de la fratrie, bien sûr, ne pas le forcer à les aimer. Et lui donner l’occasion d’exprimer ce qu’il ressent à son parent, seul à seul”.

C’est d’ailleurs souvent un besoin sous-estimé par les parents, occupés à reconstruire une famille : tous les enfants ont besoin de passer un peu de temps seul avec leur parent, et s’il en a, avec ses frères et sœurs de sa “première famille”. Un besoin naturel qui ne signifie pas du tout que la famille recomposée fonctionne mal, prévient Elena Goutard : “La famille recomposée n’impose pas une cohabitation totale 24h/24, 365 jours par an !  Prévoir de faire de temps en temps des activités séparément, cela redonne aux enfants un peu de leur vie d’avant. Cela leur permet aussi de souffler car le quotidien “recomposé” est très prenant.” Sans compter qu’avoir du temps avec leur parent “rien que pour eux” peut les rassurer sur le lien filial et leur place dans la nouvelle famille. De quoi les aider à mieux se positionner dans la nouvelle tribu. Or un enfant qui ne se sent plus insécurisé par la présence d’autres petits aura plus de facilité à se mêler à eux et à se lier avec eux, sans peur ni heurts ! 

Pour aller plus loin :

Elena Goutard est coach parental et maman de 4 garçons. Formée à la psychologie des enfants et des adolescents, elle accompagne les parents vers une vie de famille plus sereine et épanouie. Retrouvez-la sur son site : www.elena-goutard.com

Journaliste depuis plus de 20 ans, ancienne rédactrice en chef de Psychologies.com, je m'intéresse depuis toujours aux questions familiales et la psycho au sens large. Je suis moi-même mère et belle-mère et partage ici les meilleurs conseils d'experts pour vivre le plus sereinement possible le quotidien de parent séparé, que vous viviez en famille monoparentale ou recomposée.