En finir avec la famille recomposée : “Je ne voulais plus avoir à faire famille avec eux”
[Famille recomposée : ils ont jeté l’éponge] Tout est allé très vite pour T.. La rencontre, le départ de Paris, l’emménagement avec son amoureux et son fils, sa grossesse… Mais le joli scénario a viré au cauchemar quand elle découvre une famille où personne n’est à sa place. D’ailleurs, face à un papa qui ne prend pas position, elle-même ne trouvera jamais la sienne. La rupture, bien que redoutée, se révèlera un soulagement.
« J’ai rencontré le père de mon fils, il y a 6 ans. A l’époque, j’habitais Paris, il était séparé depuis deux ans… et Nantais. La question se pose assez vite de qui rejoint l’autre, mais comme il est déjà papa, j’arrive l’année suivante à Nantes, pour vivre avec lui et, une semaine sur deux, son garçon de 9 ans. Je quitte donc tout à Paris pour arriver dans une ville où je n’aie personne, ni amis, ni famille. Et tout va très vite : 5 mois plus tard, je suis enceinte.
Père invisible et ex intrusive
Avec le recul, je sais que j’ai fait preuve d’une certaine naïveté. J’ai alors 27 ans, c’est la première fois que je m’apprête à vivre avec un homme, je n’imagine aucune difficulté.
Mais déjà, en arrivant, je me dis qu’il y a des petites choses qui ne vont pas. La première qui me choque encore maintenant que je suis maman : père et fils dorment ensemble. A 9 ans, je trouve l’enfant un peu grand… Ça n’occasionne pas de conflit ouvert tout de suite mais mon arrivée change la donne pour beau-fils : à cause de moi, sa belle-mère, il ne dort plus avec son père.
Je découvre à l’occasion de nos échanges que mon conjoint, en tant que père, ne se positionne pas. Jamais. Or son ex devient vite un sujet. Car elle se révèle intrusive : elle ne veut pas me rencontrer mais a un mot à dire sur tout. C’est par son fils qu’elle apprend que je vis avec eux, un raté vite rattrapé par le papa qui finit par l’en informer… Mais trop tard. Mauvais départ.
Une situation malsaine
Et puis il y a ma grossesse. Quand je tombe enceinte, mon beau-fils commence à être très angoissé. La mère de mon compagnon ajoute son grain de sel (elle est restée très proche de l’ex). Au final, la situation me semble de plus en plus malsaine. Et mon compagnon ne se positionne toujours pas. A moi, il ne dit jamais rien de dérangeant, il ne m’a jamais répondu quelque chose comme « tu n’as pas ton mot à dire », par exemple. Mais il ne lui dit rien, non plus. Et ne fait rien pour corriger tout ce qui me semble si dysfonctionnel autour de lui, chez son ex, sa mère, son fils…
Un mariage pour me protéger, moi et mon bébé
Au moment où j’accouche, je sais déjà au fond de moi que je dois arrêter. L’ex est devenue très oppressante : ses remarques, ses avis mais plus généralement toute sa vie me reviennent par mon beau-fils. Y compris des choses assez intimes que je ne supporte pas d’entendre le soir à la table du dîner.
Avec le recul, je crois ne m’être jamais autant énervée qu’à cette période de ma vie. Je ne comprends pas pourquoi son père ne met pas de l’ordre dans tout ça. Je ne dors pas, je suis épuisée, avec un nouveau-né que je veux plus que tout protéger.
Ma réaction pour tenter de le mettre à l’abri de toutes les incertitudes que je ressens : que l’on se marie avec son père. Je sais aujourd’hui que c’est certainement aussi pour me protéger, moi. Peut-être pour une question de place, pour que tout le monde comprenne que j’étais la “femme de”. Mais au fond de moi, il y a toujours une certaine ambivalence, cette voix qui me dit qu’il faut que je me sorte de ça. Mes témoins ne s’y trompent pas et me demandent si je suis sûre de moi pour ce mariage. Je ne le suis pas mais j’ai besoin de trouver ma place.
Un beau-fils en plein conflit de loyauté
Quand j’y repense, au début, mon beau-fils m’a plutôt bien accueillie en tant que belle-mère. Il y a même eu des beaux moments, où il se confiait, me faisait des câlins. Pas énormément, mais il y en a eus ! Et de mon côté, je sais qu’il était en plein cœur d’un conflit de loyauté qui a été très dur pour lui. Je me souviens du premier Noël dans ma famille : le petit m’avait ramené les cadeaux que ma famille lui avait offerts en expliquant : « ma mère dit qu’ils n’ont pas besoin de me faire des cadeaux ». J’en avais pleuré et j’avais demandé à mon conjoint d’intervenir… Mais non.
Deux mondes inconciliables
Alors bien sûr, j’ai pensé à jeter l’éponge. Quitter cette famille recomposée… Mais j’avais un petit bébé, j’allaitais, j’étais fatiguée, je n’étais pas sûre de m’en sortir toute seule. Je me disais que c’était parce que je ne dormais pas, que la fatigue contribuait peut-être à me déstabiliser. Et c’est vrai, j’étais hyper irritable, je ne mangeais plus… J’ai décidé d’attendre un moment plus favorable.
Mais avec le temps, j’ai redormi, j’ai remangé, j’ai retravaillé et j’ai réalisé que non, je n’étais pas folle, que je n’étais pas « juste fatiguée » mais que cette famille et moi, c’était deux mondes inconciliables.
Bien sûr, je me suis dit “Comment va faire mon fils ?”, bien sûr, j’ai ressenti beaucoup de culpabilité. Mais je l’ai fait : j’ai consulté une avocate. Je me souviens lui avoir dit que je voulais divorcer. Et que je voulais divorcer vite. Je n’en pouvais plus.
Dépasser la culpabilité de la séparation
A partir de là, je suis sortie du truc. Je me suis très vite sentie à la fois soulagée et heureuse de l’avoir fait. Je m’en veux toujours un peu, surtout d’y avoir été alors même que j’avais sentie que ça n’allait pas dès le début, je le savais.
Aujourd’hui, un an après la séparation, je me sens encore choquée par cette expérience. Mais je travaille là-dessus. Mon fils va bien, c’est l’essentiel. Et même s’il m’est difficile d’être séparée de lui une semaine sur deux, je suis très contente de ne plus faire famille avec son père et mon ancien beau-fils. Au fond de moi, je sais que pour rien au monde, je n’y retournerai.