Famille recomposée : 5 questions à se poser pour savoir si on est prêt
Vous l’aimez, vous avez envie de vivre ensemble au quotidien, de retrouver une vie de famille pour vous et les enfants ? Il est peut-être temps d’emménager tous ensemble. Mais comment savoir si vous êtes réellement prêt.e pour tenter la grande aventure de la famille recomposée. Entre envie et appréhension, il n’est pas toujours facile d’y voir clair. Voici 5 questions à vous poser au calme, pour savoir si les conditions essentielles sont réunies pour vous lancer dans une famille recomposée.
1- Avez-vous fait le deuil de votre relation passée ?
(Ou si c’est votre partenaire qui est séparé, le/la sentez-vous au clair avec sa relation passée ?)
La question paraît évidente, mais pris dans le tourbillon d’une relation récente, dans l’envie de reconstruire une vie de famille, le nouveau couple a parfois tendance à brûler les étapes. Notamment celles du deuil de la relation passée, qui demande souvent plus de temps qu’on ne le croie dans un premier temps.
Or vouloir aller trop vite dans ce cas-là, signifie embarquer dans la nouvelle relation des échecs, des failles, des ressentis négatifs “non digérés” qui peuvent “s’inviter” bien malgré soi dans le nouveau couple qui aura besoin d’être fort, solide… pour ne pas mettre en danger la construction de la famille recomposée.
Car qu’on le veuille ou non, “Une famille recomposée repose sur l’existence d’une ou des familles initailes qui se sont elles-mêmes défaites”… rappellent Jean-Paul Sauzède et Anne-Sauzède Lagarde dans leur livre Former une famille recomposée heureuse (InterEditions), avant de poursuivre : ”C’est une famille qui garde les traces et les blessures d’une séparation précédente”.
Bien sûr, il ne s’agit pas de tourner radicalement la page sur vos années passées ou d’oublier à marche forcée ce que vous avez vécu, mais juste de vous demander si vous êtes bien au clair avec votre histoire pour maintenir les fantômes du passé à distance de votre nouveau couple.
Quelques questions pour savoir si vous avez fait le deuil de votre relation précédente :
- Qu’est-ce que je pense aujourd’hui de mon couple précédent ?
- Quelle est pour moi la cause de la séparation ?
- Qu’est-ce que j’ai vécu dans mon couple d’avant que je ne veux plus revivre ?
- Qu’est-ce qui me fait peur pour mon nouveau couple ?
2- Vous sentez-vous suffisamment serein.e aujourd’hui ?
Une autre conséquence du timing de la recomposition : la nouvelle famille a souvent tendance à se constituer dans ce temps de crise fort qu’est la séparation. Parce que la vie des parents séparés est difficile, parce que financièrement vivre sous le même toit est parfois l’unique solution, parce que l’on a envie de reconstruire vite une belle histoire après un échec, le couple va avoir souvent envie de vivre ensemble rapidement.
Or cette nouvelle aventure demande une disponibilité, tant physique que psychique, difficilement conciliable avec les secousses d’une séparation. Les disputes avec les ex, le sentiment très fort d’insécurité suite à la rupture et aux déménagements, la culpabilité parfois ou la peur d’être trahi.e ou maltraité.e à nouveau peuvent perturber l’équilibre psy de chacun. Conséquence ? Ces personnes risquent de ne pas être à l’écoute, ni de leurs besoins, ni de ceux des enfants ou de leur conjoint, dans cette période si délicate.
Les premiers jours d’une famille recomposée demandent beaucoup d’énergie et de patience pour que chacun trouve ses marques, son territoire, sa manière d’être en lien avec les autres. Or le stress hérité de la séparation peut alors se révéler très énergivore, très fatigant. La recomposition apparaît alors comme un deuxième marathon qu’il faudrait enchaîner après celui, éreintant, de la séparation. Ce qui peut s’avérer très difficile quand les blessures du passé sont encore très vives. La psychologue Agnès de Viaris explique ainsi dans son ouvrage “Famille Recomposée : Guide de premiers secours pour une vie harmonieuse” : “Certaines personnes en grande souffrance se lancent dans la recomposition, ce qui complexifie inévitablement la situation. La vie commune donne alors les occasions d’installer inconsciemment des champs de bataille où sont revécus des conflits parfois trop lourds à dépasser. D’autres personnes, au contraire, ont un terrain psychologique plus favorable qui facilitera l’adaptation à la recomposition.”
Prendre le temps de digérer la séparation, de retrouver un équilibre et une certaine sérénité avec vos enfants vous permettra d’aborder avec moins de stress l’étape de la recomposition. Et si vous n’avez pas ce temps devant vous, n’hésitez pas à tester des techniques de relaxation ou à vous faire aider par un professionnel de l’accompagnement, pour vous apaiser au maximum.
Quelques questions à vous poser pour savoir où vous en êtes côté stress :
- Qu’est-ce que je ressens quand je pense à ma séparation ?
- Est-ce que je parviens à prendre un peu de distance face aux émotions négatives qui y sont liées ?
- Aujourd’hui, est-ce que je me sens : très stressé.e ? Moins stressé.e qu’avant ? Apaisé.e ? Excitée par l’avenir ?
- Qu’est-ce qui cause mon stress ? Est-ce que je sais comment le faire baisser ?
3- Avez-vous trouvé un logement qui convienne à toute la famille recomposée ?
Emménager tous chez lui ? Inviter tout le monde à s’installer chez soi ? Chercher un endroit neutre et suffisamment grand ? Quand la décision de vivre ensemble est prise, on peut être tenté d’opter pour la solution d’emménagement la plus simple et la plus rapide possible.
Or cette question du lieu est loin d’être anodine ! La répartition des espaces entre les conjoints mais aussi la place qui est laissée aux enfants (et à tous les enfants, car c’est un besoin fondamental !) sont autant de facteurs qui vont faire que la famille recomposée va s’approprier le logement, s’organiser, construire sa vie commune, entre lieux partagés et zones réservés à l’intime.
Si l’un des partenaires ne s’y sent pas assez à l’aise, pas assez chez lui, si ses enfants ne sont pas traités à égalité avec ceux de son conjoint, cela ne va pas permettre l’émergence d’une vie quotidienne heureuse et harmonieuse pour la famille recomposée.
Il est donc capital de trouver une solution qui convienne autant que possible à tous.
Quelques questions pour faire le point sur un prochain emménagement ensemble :
- Est-ce que vous avez l’un ou l’autre peur, en emménageant chez l’autre, de vous sentir en permanence “invité.e” et non pas chez vous ?
- De quoi avez-vous chacun besoin pour vous sentir chez vous ?
- Ressentez-vous au fond de vous le besoin d’un nouveau lieu à investir tous ensemble pour poser les bases de votre famille recomposée ? Une page blanche pour écrire votre nouvelle histoire ?
- Les espaces pour les enfants vous semblent-ils suffisants ? La répartition entre enfants vous semble-t-elle juste ?
4- Si vous allez devenir beau-parent : vous sentez-vous capable de prendre soin des enfants de votre partenaire ? Vous êtes parent : vous sentez-vous capable de donner à votre partenaire un rôle auprès de vos enfants ?
Le beau-parent n’a pas vraiment un rôle facile dans la famille recomposée :
- il doit apprivoiser ce rôle que rien ne définit précisément, ni la loi, ni les moeurs
- il doit “se faire adopter” par ses beaux-enfants qui sont parfois très suspicieux vis-à-vis de lui, cet inconnu qui déboule dans leur vie,
- mais il doit également faire accepter ses interventions à son partenaire qui peut avoir tendance à se sentir seule personne légitime quand il s’agit de ses enfants.
Dans la magie de la rencontre, la mission peut sembler assez facile. Combien sont ceux qui ont pensé : “J’aime tellement ma/mon partenaire, j’aimerais forcément ses enfants” ? “Quand il y a de l’amour, il y a toujours des solutions !” ? Des sentiments très nobles mais qui peuvent très vite se heurter au quotidien. Des enfants peu réceptifs aux efforts des adultes, qui n’ont pas envie de s’attacher et encore moins d’obéir à un autre adulte peuvent vite vider les réserves de patience d’un beau-parent pourtant bien intentionné. Surtout s’il ne reçoit pas l’aide de son amoureux.se !
L’une des grandes désillusions auxquelles doit faire face le nouveau beau-parent est la difficulté de nouer des relations apaisées avec les enfants de son conjoint. Ce n’est pas impossible, mais souvent cela prend du temps et demande de s’éloigner un peu de l’image parfaite de grande famille parfaite. Jean-Paul Sauzède et Anne-Sauzède Lagarde le rappellent ainsi dans Former une famille recomposée heureuse : “Personne n’est obligé d’aimer les autres membres mais tous doivent apprendre à s’accepter” dans une famille recomposée. Une fois libéré de cette injonction à aimer et se faire aimer, le beau-parent peut plus sereinement envisager sa place auprès de son partenaire et de ses enfants.
Quelques questions à se poser pour savoir si l’on prêt à devenir beau-parent au quotidien ?
- Qu’est-ce que je ressens au fond de moi quand je partage des moments du quotidien avec ses enfants : un petit-déjeuner partagé en vacances, un jeu un week-end, cette fois où vous êtes allé le chercher à l’école ?
- Est-ce que je me sens à l’aise, à ma place, quand on est tous ensemble ?
- Est-ce que j’ai tendance à me forcer pour me sentir aimée / acceptée par ses enfants ?
- De quoi ai-je besoin pour me sentir à l’aise dans mon rôle de beau-père ou belle-mère ?
5- A quel point vous sentez-vous “obligé.e” de “réussir” votre famille recomposée ?
La question vous semble étrange ? Et pourtant… La famille que vous vous apprêtez à construire est, on l’a vu plus haut, marquée par les couples précédents et leur séparation. “Avant même d’être recomposée, une famille recomposée porte en soi une histoire déjà faite de déconstruction et de fin…” résument ainsi Jean-Paul Sauzède et Anne-Sauzède Lagarde, avant de poursuivre “dans la construction du couple et de la famille vient s’inscrire la blessure de la séparation accompagnée de l’échec de la relation amoureuse précédente”.
La conséquence ? On a tendance à vouloir prendre sa revanche, prouver qu’on avait raison de se séparer, raison de tenter une autre histoire. Cette nouvelle famille, bien souvent, ont veut la réussir coûte que coûte, quoi qu’il en coûte. “De ce fait, une famille recomposée par avec ce défi : “cette fois-ci, je vais réussir” !” renchérissent les thérapeutes.
Mais cette injonction peut avoir des effets destructeurs : on peut avoir tendance à se mettre des oeillères, accepter des gestes, des mots, des situations que l’on n’aurait jamais acceptés autrement, faire des efforts démesurés, s’oublier… Bref, être prêt.e à donner sans compter ni se protéger pour réussir sa famille recomposée n’est pas un gage de réussite. Au contraire, “le défi de la réussite à tout prix est toxique car il induit pour le couple et les enfants des contraintes de performance”.
Cette aventure va nécessairement entraîner des oppositions, des conflits, des adaptations, des compromis… Mieux vaut être sûr.e de vous et de ce que vous voulez ou ne voulez pas pour vous ou vos enfants. Mieux vaut être lucide et conscient des difficultés, plutôt que d’être guidé.e par la peur d’une nouvelle séparation.
Les questions à se poser pour savoir si vous êtes soumis.e à l’injonction de réussite:
- Réussir son couple, ça veut dire quoi pour moi ? Et une famille réussie ?
- De quoi ai-je besoin pour bien vivre la recomposition à venir ?
- Qu’est-ce qui m’alerterait ? Me ferait dire que la situation ne me convient plus ou ne convient plus à mes enfants ?
- Qu’est-ce qui me fait le plus peur aujourd’hui pour mon futur : la solitude ? Perdre mon nouvel amour ? Devoir affronter un nouveau changement de vie ? Rendre mes enfants malheureux ?…